L'ex-directeur d'antenne de la Une se livre pour la première fois et nous dévoile les coulisses fascinantes des médias et du pouvoir. Dans « Pouvoirs », loin de vouloir régler ses comptes, il décrit précisément l’évolution de l’audiovisuel et d’un point de vue original, celui de la politique.
Évidemment, Etienne Mougeotte en profite pour revenir sur les dessous de quelques émissions culte et brosser un portrait de quelques stars de TF1 de l’époque. Découvrez notre sélection d’extraits inédits :
Après Antenne 2, Jean-Pierre Foucault va devenir une star sur TF1. Il dispose d’un fort potentiel. Spontané et sympathique, il incarne la gentillesse même. Il est dans la vie comme à l’antenne. Toujours souriant, c’est aussi un présentateur sans prétention. Je découvre par exemple que c’est un observateur attentif de l’actualité en général, et de la politique en particulier. Il se hissera facilement au niveau des grands présentateurs. […] Foucault est le plus facile : pas prisonnier de son statut de star, il n’a jamais pris la « grosse tête ».
Pour succéder à Mourousi, je choisis de prendre le contre-pied et d’ailleurs chercher son contraire en la personne de Jean-Pierre Pernaut. C’est l’homme du terroir, de la France profonde, qui a une empathie exceptionnelle et une capacité rare à faire comprendre l’actualité au plus grand nombre. […] Lorsque je lui fais une remarque ou une critique, il se justifie toujours. C’est sa façon de me répondre. Néanmoins, il ne me pose aucun problème.
Christophe Dechavanne et Nicolas Hulot deviendront les stars des années 1990 sur la chaîne, le premier avec « Ciel mon mardi ! » et « Coucou c’est nous ! », le second avec « Ushuaïa ». Dechavanne a la capacité rare de mêler le rire, la spontanéité et l’animation d’un débat. Hulot est un personnage hors norme. Arrivé à TF1 avec l’image d’un aventurier sympathique qui part au bout du monde en ULM, il n’a peur de rien. Peut à peu, il va mûrir sa conscience écologique. […] Avec Dechavanne c’est blanc ou noir. Certains jours, la discussion peut s’engager franchement. D’autres fois, il ne supporte pas la moindre observation.
La première édition de Koh-Lanta est présentée par le motard aventurier Hubert Auriol. La voix off est assurée par Denis Brogniart, qui est à l’origine un journaliste sportif. Lorsque mon adjoint Xavier Couture découvre les épisodes de la première édition, il est catastrophé. C’est indiffusable en l’état. Le montage est raté, ça ne fonctionne pas. Tout va devoir être remonté avec le producteur Franck Firmin-Guion pour rendre la compétition moins heurtée, l’esprit d’équipe plus présent, l’aventure humaine plus forte, le rapport à la nature plus authentique. La mécanique du jeu sera améliorée dans les saisons suivantes. L’émission s’est imposée comme un programme phare de la chaîne grâce à Denis Brogniart, enthousiaste aujourd’hui comme au premier jour.
Cauet a poussé assez loin le concept du talk-show déjanté, en formant à l’antenne un couple efficace avec Cécile de Ménibus. Rien ne n’arrête. Venu de la radio, il y est retourné. C’est là qu’il est le meilleur.
Bernard Montiel est un véritable couteau suisse. Il sait vraiment tout faire, « La Une est à vous » ou « Surprises sur prises ». Un jour, il déclare à un magazine télé qu’il présente « Vidéo Gag » « sans aucun plaisir ». Je trouve le propos désobligeant pour son public. Je décide de m’en séparer. C’était une erreur.
Je repère Arthur, dont l’image est clivante. C’es Jean-Luc Mélenchon qui lui donne sa chance en 1983 sur Nord-Essonne, une radio libre. Il passe ensuite sur Fun Radio, puis sur Europe 1. Il se proclame alors « l’animateur le plus con de la bande FM ». Un contre-emploi parfait. Arthur est dans la vie le contraire de l’image de l’on a de lui : il a une vraie profondeur personnelle. Il se révélera un très bon producteur et un homme d’affaires redoutable.
Vincent Lagaf' est à fleur de peau. Incontrôlable, il pense qu’il a toujours raison. Le dialogue est difficile. Même son producteur a du mal à le raisonner.
Michel Drucker est obsédé par une seule chose : conserver son lien avec son public. Il accepte toutes les remarques si elles peuvent conforter cette relation.
En 2000, Stéphane Courbit, producteur et associé d’Arthur, vient me voir pour me proposer la version française de « Big Brother ». […] Il me met le marché en main : « Je vous propose d’adapter « Big Brother » pour la France. Si vous ne voulez pas, j’airai le proposer à M6 ». La décision est difficile à prendre. Certes, le programme fonctionne partout à l’étranger, mais en provoquant des polémiques géantes. […] Patrick Le Lay organise une réunion dans son bureau avec les deux dirigeants de M6, Jean Drucker et Nicolas de Tavernost. […] Nous nous quittons sur une position commune et solennelle. Pas questions de faire entrer « Big Brother » en France via TF1 ou M6. Une semaine plus tard, coup de tonnerre : nous apprenons que Tavernost a topé avec Courbit. Nous nous sentons trahis.
La « Star Ac » est l’anti-« Loft ». […] Nous cherchons seize candidats. Nous avons assez vite notre compte, mais il nous en manque une. Nous devons départager une hôtesse de l’air et la future Jenifer, qui remportera la première saison. Courbit est pour l’hôtesse de l’air, moi pour Jenifer. Pascal Nègre tranche en ma faveur : « Elle chante faux, mais elle bouge bien ! ».