Le programme s’intéressait mardi soir aux méthodes de management ravageuses. Leur enquête baptisée « Travail, ton univers impitoyable » les a menés dans les entrepôts de Lidl et les plateformes téléphoniques de Free.
Afin de calculer et analyser les cadences intenables au sein de l’enseigne majeure de la grande distribution, un journaliste a infiltré l’un des postes de préparateur de commande. Pression sur les objectifs, charges transportées, guidage dans les rayonnages, fonctionnement des magasins et des entrepôts, tout a été passé au crible. Pire, une conversation enregistrée entre un manager et un chef de magasin révèle des menaces incroyables : « Ça va être à feu et à sang (...) Je te mettrai 6 jours de mise à pied à longueur de temps, tu vas mourir. »
Du côté des centres d'appels de Free ce n’est guère plus glorieux. Entre celui de Colombes et au Maroc, on licencie systématiquement pour faute grave. Pratique, cette méthode permet à l’entreprise de faire des économies conséquentes sur les indemnités. Et si la responsable RH verse trop d’indemnités, elle est elle aussi remerciée pour faute grave ! L’émission a enfoncé le clou en publiant un échange de mail entre les hauts dirigeants du groupe Iliad (maison mère de Free). « Nous liquiderons les 50 détracteurs » aurait écrit Angélique Gérard, directrice des relations abonnés, au sujet de salariés en grève à Casablanca.
Si les différents responsables interviewés par Elise Lucet sont restés évasif sur les faits reprochés, les révélations ont visiblement été très appréciées par le public. Avec plus de 3,8 millions de téléspectateurs, le magazine produit par Premières Lignes a signé son record d’audience depuis sa création en 2012.
Lidl répond à ses clients, Free déstabilisé par le reportage.
Si Free n’a pas encore commenté le reportage de Cash Investigation, l'opérateur de Xavier Niel a été secoué par le reportage. En revanche Univers Freebox semble défendre la marque à travers un long article ponctué de témoignages positifs. Le site qualifie les séquences « d’enquête à charge » et préfère relever les bons côtés de travailler dans leurs centres d’appels : salaires hauts par rapport aux concurrents avec les primes, bonnes relations, services gratuits comme les boissons, évolutions de carrières rapides même sans diplôme, soirées entre salariés, etc.
Dans un communiqué, Lidl se jette des fleurs, en assurant tout faire au mieux pour ses salariés. Sans s’excuser, ni se remettre en question sur les faits exposés dans Cash Investigation, l’enseigne se contente juste d’écrire que « l’amélioration des conditions de travail de nos salariés va de pair avec le développement économique de l’entreprise. Le reportage diffusé hier ne reflète pas cette réalité, bien que nous ayons décidé d’ouvrir nos portes à Cash Investigation, sans poser aucune condition préalable, en entrepôt, en magasin et au travers d’une interview de 2h30 d’un dirigeant de l’entreprise. » Toutefois l’enseigne condamne les propos tenus et menaces de mort d’un de ses managers.
Des entrepôts en grève et des plateformes qui tremblent.
Depuis la diffusion de Cash Investigation, y’a-t-il des évolutions chez les 2 marques ciblées ? Actuellement à l’entrepôt Lidl du Rousset, situé dans Bouches-du-Rhône, des salariés sont en grève pour dénoncer leurs conditions de travail et le licenciement, selon eux abusif, de l'un de leurs collègues. Résultat : aucun camion ne sort de l'entrepôt depuis ce mercredi matin, et les magasins de la région pourraient connaître des ruptures en produits frais ainsi qu’en fruits et légumes.
Trois directeurs de centre d’appels de Free devraient quitter leur poste dans les prochains jours, d’après Politis, sans savoir si les révélations de l’émission ont un lien avec ces départs. Il y a fort à parier que les plateformes téléphoniques des concurrents ont également dû trembler. En effet, qu’en est-il chez SFR, Bouygues ou encore Orange ?